dimanche 20 février 2011

Hsu Yun Dashi









Le 13 octobre 1959 mourait au monastère Yun-Ch'u, dans le Kiang-si, maitre Hsu Yun, âgé de cent vingt ans et moine depuis cent un ans. C'était le dernier grand représentant de la tradition tch'an. Ainsi qu'on le verra par le texte ci-dessous (le hua-t'ou et le doute) sa contribution à l'enseignement lui apportait encore une note originale et personnelle.
Source du texte : Les maitres zen, de Jacques Brosse. Ed. Bayard.


Bibliographie :
- Essentiel de l'entrainement Tch'an, trad. Lou Kouan You, dans Tch'an, zen, racine et floraisons. Ed. Hermès.
En ligne :
Poèmes de Hsu Yun : PDF
Les pré-requis de la pratique du Chan : Kalyanamitra
La pratique du Chan : Kalyanamitra



L'entrée dans la voie :
Tant de gens dans la salle de pratique.

Mais combien d'entre eux portent le sabre long
,
Le sabre du secours céleste ?
Tout doit être mis en pièce
Les saints, les démons, tout !
Le sang doit gicler dans toutes les directions du ciel.
Tel est l’enseignement sans détour !

Déverrouillez les portes d'or qui mènent à l’abysse
Ce sont elles qui gardent l'entrée de la Voie.
 

Assis, soyez impitoyables !
Faites de votre assise une lame qui tranche les lianes de l’ignorance.
Que votre œil transperce le vide ! 

Mettez à nu votre vrai visage,
Celui que vous aviez avant que votre mère ne vous donne naissance.
Source du texte : Kalyanamitra



Ou encore, quand, dans un ciel clair, le soleil se lève et que sa lumière entre (dans la maison) par une ouverture, on voit la poussière voler dans le rayon, alors que l'espace vide est immobile. Ainsi ce qui est immobile est le vide et ce qui bouge est la poussière. (...)
Par la poussière qui vole d'elle-même et ne dérange pas le vide qui demeure immobile, on entend que la pensée erronée afflue et reflue d'elle-même et ne gêne pas la nature du Moi qui est immuable dans sa condition de bhutatathata (réalité).
- Essentiel de l'entrainement Tch'an, trad. Lou Kouan You, dans Tch'an, zen, racine et floraisons. Ed. Hermès.


Qu'est-ce que le hua-t'ou ("mots-tête") ? Le mot est le mot prononcé et la tête, ce qui précède le mot. Par exemple lorsque quelqu'un dit "Amitabha Bouddha" c'est un mot. Avant qu'il ne soit prononcé c'est un hua-t'ou (un "pré-mot"). Ce que l'on appelle hua-t'ou est le moment qui précède la venue de la pensée accompagnée du mot qui la porte. Aussitôt celle-ci venue est devient un hua-wei ("mot-queue"). Le moment qui précède l'apparition d'une pensée s'appelle le "non-né". Le vide qui n'est ni troublé ni mort, ni immobile ou partiel, s'appelle "l'infini". L'action de tourner sans relâche la  lumière vers l'intérieur, à l'exclusion de toute autre chose, s'appelle l'examen du hua-t'ou.
Quand on examine un hua-t'ou la chose la plus importante et de faire naître un doute. Le doute est la béquille du hua-t'ou. Par exemple, quand on demande : "Qui répète le nom du Bouddha ?", un léger sentiment de doute apparaît à propos de ce "qui". Ce doute ne doit pas être rudimentaire, plus il est affiné, mieux cela vaut.
En tout temps, en tout lieu on doit considérer sans relâche ce doute seul, comme une rivière dont le cours n'est pas interrompu, sans laisser naître une seconde pensée. Dans "Qui répète le nom du Bouddha ?", l'important est le mot "Qui" et rien d'autre. Le "Qui ?" du hua-t'ou est une pratique merveilleuse dans l'entrainement du tch'an.
D'ordinaire le doute que font naître les débutant est très élémentaire, il peut s’arrêter brusquement, pour reprendre ensuite, il parait tantôt familier tantôt étrange. Il ne s'agit pas alors du vrai doute, mais de leur processus de pensée. Quand l'esprit fou aura été graduellement maîtrisé, on sera enfin en état de mettre un frein au processus de pensée, seulement alors on pourra parler de l'examen du hua-t'ou. Peu à peu, on aura plus besoin de faire naitre le doute, il naitra de lui-même. On a alors atteint une porte stratégique par laquelle il est aisé de s'écarter du droit chemin.
Tout d'abord, viendra un moment ou l'on époruvera une complète pureté et un bien être sans bornes. Si l'on manque d'être sur ces gardes et d'examiner les choses de près, on tombera dans un état de torpeur. Si un maitre est là, il le percevra immédiatement et il frappera l'étudiant avec le bâton. Un grand nombre de disciples sont à ce moment là éveillés à la vérité.
Deuxièmement, quand apparaît l'état de pureté et de vide, si le doute cesse d'exister, c'est là un état que nul ne peut décrire, dans lequel celui qui médite est semblable à un homme assis sur un arbre desséché dans une grotte, ou sur des pierres au milieu de l'eau. Quand a atteint cet état, il faut réveiller le doute qui sera suivi de la conscience et de la contemplation de cet état. La conscience (de cet état) est affranchissement de l'illusion, c'est la sagesse. La contemplation (de cet état) efface toute confusion; c'est l'équanimité. Cette réunification de l'esprit sera parfaitement tranquille et brillante dans son équanimité absolue, sa lucidité spirituelle, son entendement total, telle une fumée qui s'élève d'un lieu solitaire. Quand on a atteint cet état, on devrait posséder l'Oeil de Diamant, et se retenir de donner naissance à toute autre chose, car ce ne serait qu'ajouter une autre tête sur sa propre tête.
Extrait de : Le hua-t'ou et le doute, dans les maîtres zen de Jacques Brosse. Ed. Fayard.



Dans l'entrainement Tch'an, il faut que le désir de quitter le royaume de la naissance-et-la-mort sois sérieux et que l'on développe un esprit de longue patience (dans l'effort). Si l'esprit n'est pas sérieux, il sera impossible de faire naître le doute, et l'effort sera vain. L'absence d'un esprit de longue patience aboutira à la paresse, et l'entrainement ne sera pas continu. Développez seulement cet esprit de longue patience, et le doute naîtra de lui-même. Quand le doute s'élève, les difficultés prendront fin d'elles-mêmes. Quand le moment de la maturité apparaîtra, (ce sera comme) de l'eau courante formant un chenal.
Chers amis, le démons meurtrier de l'impermanence guette constamment notre vie et il ne consentira jamais de conclure la paix avec nous ! Développons vivement un esprit de longue patience pour nous sortir de la naissance-et-mort.
- Essentiel de l'entrainement Tch'an, trad. Lou Kouan You, dans Tch'an, zen, racine et floraisons. Ed. Hermès.


En quoi réside l’aisance des vieux pratiquants ? Uniquement dans l’absence de complaisance envers soi-même et dans une pratique minutieuse et assidue ; la minutie doit être toujours plus minutieuse, l’assiduité plus assidue, la subtilité toujours plus subtile. Quand vient la maturité, le fond du tonneau se détache de lui-même ; en d’autres mots, adressez vous à des maîtres expérimentés : ils vous aideront à extraire le dernier tasseau (de l’obstruction).
Ainsi que le dit la chanson du maître Han Shan :
Sur la haute cime d’une montagne
Ne se voit que l’espace infini.
Comment s’établir dans la méditation, nul ne le sait.
La lune solitaire luit sur la mare glacée,
Mais dans la mare il n’y a point de lune ;
La lune est dans le ciel bleu de la nuit.
Cette chanson est à présent chantée,
(Mais) il n’y a pas de Ch’an.
Les deux premiers vers indiquent que ce qui est vraiment éternel est solitaire, ne relève de rien d’autre, et luit avec éclat sur le monde sans rencontrer d’obstruction, aucune. Le troisième vers explique que le corps merveilleux du Bhûthatatâ ne peut être localisé ni par les mondains ni par les bouddhas des trois époques : « nul ne le sait ». Les trois vers suivants (4ème, 5ème et 6ème) constituent l’interprétation expédiente de cet état par le vieux maître. Les deux derniers vers (7ème et 8ème) nous avertissent, de crainte que nous ne confondions le doigt et la lune, qu’aucun de ces mots n’est du Ch’an.
Ma causerie ressemble à une accumulation de choses ; elle est comme l’entrave de plantes rampantes et une rupture importune, car mots et paroles ne peuvent exprimer l’inexprimable. Quand les maîtres anciens recevaient leurs étudiants, ils se servaient de leur bâton ou criaient pour les éveiller : on ne s’embarrassait pas de tant de sophistication. On ne peut toutefois comparer présent et passé, il est donc impératif de pointer un doigt vers la lune.
Chers amis, réfléchissez à tout cela je vous prie ; après tout qui pointe le doigt et qui cherche la lune ?
Extrait de : Facilité pour les vieux pratiquants : une pratique minutieuse et assidue., dans les maîtres zen de Jacques Brosse. Ed. Fayard.


A la recherche de la vérité (5) :
Fais l'expérience du Chan ! Il ne peut être décrit.
Si tu le décris, tu en perds le sens.
Lorsque tu découvres que tes preuves sont sans substances,
Tu réalises alors que tes mots ne sont que poussière. 
Source du texte (divers poèmes de Hsu Yun) : PDF


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