mercredi 31 octobre 2012

Gnânânanda

On sait pourtant, ou du moins on croit savoir le lieu de sa naissance, Mangalagiri, au pays Kannanda. Son père était Venkatapati Rao, sa mère, Chandasikla Bai. Il se serait enfui de la maison paternelle à l'âge de onze ou douze ans après une querelle avec son frère aîné qui l'avait battu. Il aurait alors rencontré un sadhou et avec lui serait monté aux Himalayas. Selon d'autres, il serait venu d'abord à Vellanatham, et de là serait allé au Kasmir. (...) Il parcouru ensuite l'Inde entière, et aussi l'île de Ceylan et la Birmanie, (...)
Il n'aurait pris officiellement le sannyasa qu'après une quarantaine d’années de vie ascétique, itinérante ou solitaire. (...)
Son âge ? Beaucoup disent cent vingt ans. D'autres, par calcul astrologique, lui en ont découvert cent cinquante trois. Mais comment lui donner cet âge, alors qu'il demeure si alerte, marche comme pas un, tire lui-même l'eau du puits pour son bain matinal. Il a bon pied, bon oeil, dirige toutes les installations nouvelles. Son visage ne porte aucune ride. A le voir, à coup sûr, on aurait déjà du mal à lui donner soixante-dix ans. (p.59)
Gnânânanda meurt en 1974 à Tiroukoyilour (près d'Arunachala).


Biographie :
Swami Abhisiktananda (Henri Lesaux), Gnânânanda, Un maître spirituel au pays tamoul, Ed. Présence, 1970. (Ouvrage épuisé).


Rentre en toi
au lieu où il n'y a rien
et prends garde que rien n'y vienne
Pénètre au dedans de toi
jusqu'au lieu où nul penser n'est plus, 
et prends garde que nul penser ne s'y lève !
Là où rien n'est, 
le Plein !
Là où rien n'est vu, Vision de l'Etre !
Là où rien n’apparaît plus, 
Apparition du Soi ! 
Dyâna, c'est cela !

Si tu veux vraiment parvenir à dyâna, bien loin de chercher à apprendre quoi que ce soit de nouveau, il faut tout au contraire que s'en aille et disparaisse sans retour tout ce que tu peux avoir appris auparavant. (p.110)

(...) c'est du lieu d’où s'élève le souffle que s'élève également les pensées. L'important c'est de se tenir en ce lieu original de l'être et de veiller avec soin que le silence et la pureté n'en soient jamais ternis, et que soi-même on ne se laisse pas distraire et entraîner au dehors. Alors quand des pensées cherchent à jaillir - et elles le font sans interruption - pour éviter d'être emporté par elles, il suffit de remonter à la source de chacune d'elles - et de foncer au sein même de la vague qui vous ramène au rivage - de chercher qui pense cette pensée, la pensée fondamentale qui est à l'origine de toute pensée : ainsi vous revenez en votre lieu originel, le lieu en qui tout lieu a disparu, le Soi en qui tout soi s'est évanoui. La concentration sur le souffle aide à l'intériorisation. En suivant votre souffle retournant à ses origines, c'est à votre source même que vous aussi vous revenez.

Là où jaillit le Je, jaillit le souffle, 
Là où jaillit le Soi, jaillit la pensée de soi, 
Là d'où s'élance le souffle, 
c'est là-même qu'éclot le Je. 
Là même où le soi se pense, 
brille le Soi. 
(pp.112/3)

Tout cela c'est l'effort, auquel nul ne peut se soustraire, et sans lequel la grâce est incapable d'agir en vous.
Ferez-vous du feu avec du bois vert ? Il faut couper la branche, la faire sécher. Après cela seulement le feu prendra. Le feu c'est la grâce, la préparation du bois, la sadhana, l'effort de celui qui veut vraiment réussir.
Il faut n'avoir qu'un but. On se renseigne sur le but, mais une fois celui-ci connu, on ne perd pas son temps à quémander à nouveau à droite et à gauche. On va droit devant soi là où on a décidé d'aller.
A quoi bon courir de maître en maître ? A quoi bon passer son temps à lire à et se renseigner sur les différentes méthodes ? Lire et se renseigner, c'est consulter la carte et l'horaire. Si on veut aboutir au lieu indiqué par la carte et l'horaire, il faut bien un jour se décider à prendre le train. (p.115)

Il y a trois sortes de samadhi, explique-t-il.
Le premier est le vaikalpa samadhi, celui où il demeure encore quelque conscience de soi à part, quelque "souvenir".
Le second est le nirvikalpa samadhi. Ici il n'y a plus ni dehors ni dedans, ni soi, ni autre. Rien ne frappe plus les sens, ni ceux du corps, ni ceux de l'esprit. Il n'y a plus ni pensée, ni sentiment. On peut vous toucher, vous
mouvoir, vous soulever, vous êtes totalement inconscient. C'est plénitude et c'est béatitude, plénitude de joie, plénitude et joie indivises, (...)
Plus haut encore cependant il y a le sahaja samadhi, quand enfin on a atteint l'état, plutôt le point originel de soi : originel, parce que né-avec-soi mais mieux encore "non-né", car en effet, quelle est l'origine de l'être ? Ici enstase comme extase sont dépassés. Aucune différence nulle part n'est plus perçue. Le jnâni vit au milieu du monde comme tout le monde. Cependant, alors que les autres voient d'abord la diversité des choses, lui, il les voit dans leur unité. En découvrant le Soi, il découvert soi et le Soi en tout. Le moi a disparu qui s'interposait entre "lui", "soi", et les autres, et déjà entre sa conscience de soi et la réalité de son être. Rien ne s’oppose plus désormais à la perception de la réalité de soi.

Le jnâni marche à travers les eaux
la tête au-dessus des eaux toujours, 
le regard dépassant l'horizon, 
plongeant dans l'illimité...
Il passe à travers tout ce qui passe, 
le regard fixé sur ce qui ne passe point, 
voyant en tout
ce qui est au-delà de tout, 
fin de tout, origine de tout, 
au fond de tout, 
unique en tout, 
sans fin ni commencement nulle part, 
l'éternel...
Il s'est découvert et a découvert tout, 
au-delà de la mort, 
et du temps où, chaque instant, l'on meurt...
(pp.118/9)

Quand j'atteignis le fond de Toi, 
Oh ! qu'advint-il de moi ?
Oh ! qu'advint-il de Toi ?

Quand j'atteignis le fond de moi, 
il n'y eut plus ni Toi, ni moi !
(p.128)

Extraits de : Gnanananda (chap. L'unique nécessaire)


Dieu, dit-il une autre fois, a quatre espèces de clients.
Les premiers sont ceux qui de temps en temps se réveillent de leur sommeil, pensent un instant à lui, murmurent "Seigneur, Seigneur", et ont tôt fait d'oublier et de se rendormir.
Les seconds ont une réelle piété. Ils vont aux temples  offrent des poudjas, se rendent de pèlerinages en pèlerinages, chantent des hymnes, pratiquent le japas, servent les sadhous - mais tout cela en vue d'obtenir des biens matériels : santé, fortune, position sociale.
Les troisièmes sont les vrais bhaktas. Ils font tout ce que font les seconds, mais ils le font uniquement dans l'espoir d'obtenir des biens spirituels. Rien ne les intéresse plus ici-bas. Ils ne veulent que Dieu et Dieu seul.
Il y a enfin ceux qui ne prient plus et ne demandent plus rien à Dieu, pas même Dieu. De Dieu lui-même, ils n'ont que faire. Ce sont les jnânis.
- Dans ces conditions, Swâmi, demanda Vanya, quelle différence y a-t-il entre le jnâni et le nastika, athée ou matérialiste ? Lui non plus n'a nul désir ni nul besoin de Dieu.
- Il y a une différence quand même, et d'importance, répondit-il. C'est que le jnâni ne veut plus rien ni Dieu ni quoi que ce soit d'autre, tandis que le nastika, lui, veut tout, sauf Dieu !
Il y a les gens qui veulent tout, sauf Dieu, ceux qui veulent tout, et aussi Dieu, ceux qui ne veulent que Dieu, et ceux qui, s'étant reconnus en Dieu, ne peuvent plus avoir aucun désir, même de Dieu.

Extraits de : Gnananda (chap. Le gourou, pp.133/4)


Qui donc peut courir 
avec un sac dessus la tête ?

Ce qu'attend de toi le gourou
c'est toi, 
et pas ce que tu as acheté
en passant par le marché !

Nu tu naquis, 
nu seulement tu peux renaître, 
dans la gloire de l'âtman !

Qui se perd se trouve, 
qui tout perd tout trouve !
Qui se garde perd tout, 
et soi-même avec tout !

Là où n'est rien 
là même est tout. 
Pénètre en ce secret
et toi-même à toi-même disparais : 
alors seulement en vérité TU ES !

Extrait de : Gnanananda (chap. Fêtes à l'Ashram, pp.152/3)
 

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